Baccalauréat: historique, réformes et statistiques.

1 – Du temps des cathédrales …

Au XIII° siècle, le baccalauréat est conféré dans l’université de Paris, par les quatre facultés d’alors: Facultés des Arts, de Médecine, de Droit et de Théologie.

C’est le premier grade obtenu dans chacune des facultés  – sachant que le grade des Arts était un préalable aux autres facultés. Il fallait donc d’abord suivre les enseignements de la Faculté des Arts et en obtenir le « baccalauréat ès Art » pour poursuivre ses études dans une autre faculté. Cette faculté des arts était donc l’équivalent de notre enseignement secondaire.

La Faculté des Arts de l’université de Paris avait en enseignement de type « Lettres ». On y accédait vers l’âge de 15 ans. Les enseignements duraient 7 ou 8 ans: classes de sixième à troisième (classes dites de grammaire), classe d’Humanités (seconde), classe de Rhétorique (première), classes de Philosophie (terminale).

Au bout de 4 ans d’études, si les professeurs le jugeaient prêt, l’élève passait des épreuves à l’issue desquelles il obtenait le « baccalauréat ès arts ».  L’étudiant pouvait alors entrer dans une autre Faculté de Paris (y étudier quelques années pour avoir le baccalauréat ès médecine ou ès droit …) . Il pouvait aussi continuer dans cette faculté des arts, où il entamait alors de nouveau 3 années d’études. Son baccalauréat lui donnait le droit d’assister un professeur. A l’issue de ses 3 années d’études,  il passe la licence, puis 6 mois après il passe la « maîtrise ès arts » – marquant l’intronisation dans la corporation. Il pouvait ensuite poursuivre en doctorat pour devenir professeur.

Etymologiquement, le mot baccalauréat a pour racine la locution latine “bacca laurea” , c’est-à-dire “la couronne de laurier ”. Il s’agit de la corono triumphalis , la couronne triomphale, distinction honorifique symbolisant la gloire de son porteur. En latin tardif, il devient « baccalaureatus  » et prend pour signification « degré de bachelier donné dans les universités ».

La racine du mot « bachelier », quant à elle, diffère. Jusqu’au XVIIe siècle, avant que sa signification évolue, le bachelier n’est autre que le “jeune noble aspirant à devenir chevalier”.

2- Napoléon (re) crée le baccalauréat en 1808

Dans son souci de réformer et développer la France, Napoléon revoit l’organisation des l’éducation, fortement déstructurée au sortir de la révolution.  Il s’agit de former les élites indispensables au fonctionnement du pays.

Ainsi sont créés les lycées. Ceux-ci doivent apporter: « les connaissances premières nécessaires à ceux qui sont appelés à remplir des fonctions publiques, à exercer des fonctions libérales ou à vivre dans les classes éclairées de la société « .

Par ailleurs, avec Foucroy, il rétabli les universités de l’Ancien Régime (Facultés de Droit, de Théologie et de Médecine). La Faculté de Sciences est par ailleurs créée.

Comme vu précédemment, pour accéder aux universités, il fallait obligatoirement être titulaire d’une « baccalauréat ès art » dispensé par la Faculté des Arts. Et pour accéder à la faculté de Théologie, il fallait obligatoirement la « maîtrise ès lettre ». Napoléon reprend le principe d’un grade permettant l’accès aux facultés ainsi que le terme de « baccalauréat » – mais avec le niveau d’enseignement d’une « maîtrise ès lettre » prodigués par les nouveaux lycées.

Napoléon décide ainsi, par le décret du 17 mars 1808, de faire du baccalauréat un diplôme d’entrée à l’université. A l’époque, il ne sanctionnait pas encore les années d’études passées aux lycées; il était  – et il est toujours – le premier grade de l’université.

La première promo de bacheliers de 1809 présentera 39 candidats, tous issus de la haute bourgeoisie).  31 seront reçus … Beau taux de réussite de 80% qui sera aussi haut pendant de nombreuses années, jusqu’en 1840 où les baccalauréat va se durcir.

3- Grandes étapes d’évolution du baccalauréat.

 

3.1 – Jusqu’à 1945, le bac reste « confidentiel »

 

Jusqu’à la deuxième guerre mondial, le baccalauréat ne concerne que quelques élites fortunées (il est considéré comme le « brevet de bourgeoisie ») . Il est resté pendant plus de 50 ans en dessous de la barre de 5 000. Puis a progressé surtout après la première guerre mondiale mais en ne dépassant jamais 15 000 diplômés.

 

Quand il est créé en 1808, l’examen ne comporte alors que des épreuves orales sur les « humanités »: auteurs grecs et latins, la réthorique, l’histoire, la géographie et la philosophie.

En 1840 introduite des épreuves écrites. L’objectif est de rendre l’examen plus difficile (afin de concurrencer l’école polytechnique).

En 1853 est introduit une épreuve de langue vivante.

Malgré l’opposition de conservateurs attachés aux enseignements classiques, le baccalauréat se modernise peu à peu au profit des sciences – conséquence directe de la révolution industrielle.

1874 : le baccalauréat comporte deux séries d’épreuves, en première (1er Bac) et en Terminale (2ième bac). Toutes les matières sont passées dans les deux bacs. C’est en 1969, sous l’afflux de candidats (et du manque de professeurs et de salles), que toutes les matières à l’exception du Français sont supprimés du 1er Bac – qui devient le bac anticipé – et que la majorité des épreuves orales sont supprimées.

1880: Jules Ferry, rend obligatoire l’éduction primaire; par ailleurs, il met fin au monopole du latin au profit de la littérature française. Ces mesures vont permettre la popularisation du baccalauréat. De 7000 bacheliers en 1890, on passe à 37000 en 1926.

1927 : La baccalauréat à trois séries : A latin-grec; A’ latin-langue vivante; B langues vivantes

1947 : Le bac à trois filières: « Philosophie », « Mathématiques élémentaires » et « Sciences expérimentales ».

1953 :Création de la série technique B – Technique et économique.
Remplacement de la session de septembre par un oral de contrôle.

3.2 – Le bac se développe surtout à partir des années 60.

 

 

Les années 1960

Le nombre d’élève scolarisé en collège explose sous l’effet de plusieurs facteurs:

  • La poussée démographique du baby boom d’après guerre
  • L’accroissement des outils de production (automatisation …)
  • L’allongement de la scolarité obligatoire à 16 ans (Réforme Berthoin de 1959)
  • une demande croissante de famille à pousser leurs enfants étudier.

Entre 1965 et 1975, l’état ouvrira un collège par jour ouvré!

L’éducation est alors organisée en 2 systèmes totalement hermétiques:

  • l’école primaire (gratuite) – qui menait au certificat d’étude et au brevet.
  • Les lycées (onéreux) qui prenaient les enfants dès 6 ans et qui les menaient jusqu’à la classe de terminale et au baccalauréat.

1968 : forte réforme

Naissance du baccalauréat technologique.

Le bac général voit la création de 5 filières:

  • A: Philosophie – lettre
  • B: Economique et Social
  • C: Mathématiques et sciences physiques
  • D: Mathématiques et sciences de la nature (la série D’ sciences agronomiques et technique sera créée en 1969)
  • E: Mathématiques et technique

Ce bac allie un formation générale à une formation technologique. Il mène logiquement à des poursuite d’études en BTS et IUT.

1985

Jean-Pierre Chevènement, alors ministre de l’Education, assure vouloir amener 80 % d’une classe d’âge au niveau du baccalauréat à l’horizon des années 2000. Cette même année là, seuls 30 % des étudiants obtiendront leur baccalauréat.

C’est la création du baccalauréat professionnel qui peut rendre cette promesse possible.

Les spécialités et enseignements sont conçus en collaboration avec les milieux professionnels. Il visent à répondre aux besoins des employeurs en terme de techniciens, ouvriers hautement qualifiés …

En 1993 réforme du bac:

Les bacs généraux deviennent

  • S (Scientifique)
  • ES (Economique et Social)
  • L (Littéraire)

Les bacs techno deviennent:

  • STI
  • STL
  • SMS
  • STT

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En 2013, le baccalauréat a affiché un taux de réussite de 86,8 % (91.9 % au bac général, 86.4 % au bac technologique et 78.5 % au bac pro). Mais il ne s’agit pas de l’intégralité d’une classe d’âge : en réalité, le chiffre stagne, depuis 1995, à 64 %. L’objectif de Chevènement n’est toujours pas atteint.

Surtout, le bac n’a de cesse d’être remis en cause. On retrouve maintenant les taux de réussite qui étaient ceux des premières promotions de 1809, époque à laquelle le bac était « donné ». Et c’est là tout le reproche qui lui est fait : un diplôme accessible à tous a-t-il encore la même valeur ?

Ce n’est finalement plus d’obtenir le baccalauréat, qui est symbole de réussite, mais la filière à laquelle il est associé. Et les taux d’échec en première année d’université sont là pour rappeler que l’obtention du diplôme n’est pas synonyme de réussite, alors même que sa fonction première est de permettre d’y entrer . Deux cent ans d’histoire n’ont pas conduit à faire du baccalauréat l’examen idéal. Sa forme, ses enseignements, fluctuent au gré des évolutions de la société. Nul doute qu’il est encore amené à changer.

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Et les femmes?

Napoléon n’avait jamais imaginé qu’une femme puisse se présenter à l’examen du baccalauréat. Le décret de 1808 ne parle de que candidats, et pas de candidates.

Il y avait bien un système secondaire d’éducation féminin mais qui n’avait pas le même programme que les garçons. Notamment le Latin et les Maths n’étaient pas enseignés. La méconnaissance du Latin était rédhibitoire, puisque les épreuves du baccalauréat sont en latin…

La première diplômée du baccalauréat est Julie-Victoire Daubié, en 1861. Elle avait appris le Latin grâce à l’enseignement du Latin par son frère, qui était curé. Le ministre refusera de signer son diplôme. C’est grâce à une intervention « musclée » en conseil de ministres, de l’impératrice Eugénie, épouse de Napoléon III, que le diplôme sera reconnu deux ans plus tard.

Les bachelières restent pendant longtemps des exceptions. En 1892, elles ne seront que 10 à être diplômées.

Mais à partir de 1918, des boites à bac et des cours du soir privés se développent pour dispenser l’enseignements des matières manquantes – prodiguées dans le secondaire pour les garçons, mais pas pour les filles. En 1920, elles seront 1000 diplômées.

En 1924 le programme de l’enseignement en secondaire deviendra enfin commun pour les garçon ET les filles. Les filles peuvent enfin passer les épreuves!

 

Sources:

Marie-Odile Mergnac –  » Histoire du Baccalauréat »

https://www.franceculture.fr/histoire/le-baccalaureat-deux-cents-ans-dhistoire

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